Charlie le saisit et déchira l’enveloppe… et soudain d’au-dessous
du papier... s’échappa un brillant éclair d’or.
Le coeur de Charlie s’arrêta net.
—
« Un ticket d’or ! hurla le boutiquier en sautant en l’air.
Tu as trouvé un ticket d’or ! Le dernier ticket d’or ! Hé,
les gens ! Venez voir, tous ! Ce gosse a trouvé le dernier ticket d’or
Wonka ! Le voici ! Il l’a entre les mains ! »
On eût dit que le marchand allait avoir une crise. « Et c’est
arrivé dans mon magasin ! hurla t-il. C’est ici, dans ma petite
boutique, qu’il l’a trouvé ! Vite, appelez les journaux,
apprenez-leur la nouvelle ! Attention, fiston ! Ne le déchire pas ! Ç’est
un bien précieux ! »
Au bout de quelques secondes, il y avait autour de Charlie un attroupement
d’une vingtaine de personnes, et d’autres encore accouraient de
la rue. Tout le monde voulait voir le ticket d’or et l’heureux
gagnant.
—
« Où est-il ? cria quelqu’un. Tiens-le en l’air pour
que nous puissions tous le voir !
—
Le voilà ! cria une autre voix. Il l’a en main ! Voyez comme ça
brille !
—
Je voudrais bien savoir comment il a fait pour le trouver ! cria d’une
voix maussade un grand garçon. Moi qui achetais vingt bâtons par
jour, pendant des semaines et des semaines !
—
Et tout ce chocolat qu’il va pouvoir s’envoyer ! dit jalousement
un autre garçon. Il en aura pour la vie !
—
Il en a bien besoin, ce petit gringalet, il n’a que la peau sur les os
! dit en riant une fillette.
Charlie n’avait pas bougé. Il n’avait même pas tiré le
ticket d’or de son enveloppe. Muet, immobile, il serrait contre lui son
bâton de chocolat, au milieu des cris, de la bousculade. Il se sentait
tout étourdi. Tout étourdi et étrangement léger.
Léger comme un ballon qui s’envole dans le ciel. Ses pieds semblaient
ne plus toucher le sol. Et quelque part, au fond de sa poitrine, il entendait
son coeur qui tambourinait très fort.
Soudain, il sentit une main sur son épaule. Il leva les yeux et vit
un homme de haute taille. « Écoute, dit l’homme tout bas.
Je te l’achète. Je te donne cinquante dollars. Qu’en penses-tu,
hein ? Et je te donnerai aussi une bicyclette toute neuve. D’accord ? »
—
« Vous êtes fou ? hurla une femme qui se tenait à distance égale.
Moi, je le lui achète cinq cents dollars ! Jeune homme, voulez-vous
me vendre ce ticket pour cinq cents dollars ? »