LA CREATION

 Yantet était curieux comme tous les enfants de 10 ans et les béarnais en particulier. Mais méfiant aussi. Ainsi, lorsqu'il vit arriver à nouveau ces deux cavaliers de l'armée anglaise droit sur le champ où il gardait les trois vaches de son père, sa première réaction fut, comme la veille, de se cacher.

Avec les soldats, on ne sait jamais " lui avait-on dit, surtout que peu avant, son père le lui avait répété: ces mêmes soldats anglais avaient battu les troupes françaises à Orthez.

" Mais ces soldats qui revenaient n'en voulaient pas à ses bêtes ayant mis pied à terre, ils se mirent â taper avec un bout de bois contre une balle au sol, sur ces bords du gave à un galop de Pau.

On était en mars 1814. Les deux officiers étaient des nobles écossais de l'armée de Wellington. Ils venaient de reconnaître les limites du premier golf du continent européen : celui de Pau.

Si l'histoire n'a pas retenu les noms de ces deux officiers anglais, c'est sans doute qu'il ne s'agit-là que d'une légende.

R. Ritter, lui, en est persuadé ; qui écrit dans le Journal des Pyrénées à propos de cette partie de golf des officiers anglais :

On a voulu donner au terrain de golf de Pau-Billère des origines fabuleuses. A en croire une légende tenace, son premier tracé sur son emplacement actuel aurait été' dû à des officiers écossais de l'armée de Wellington en garnison à Pau en 1814; c'est une histoire â dormir debout. En réalité, il n y eut aucune occupation de Pau par les forces alliées. C'est à Toulouse que devait se livrer la bataille finale de la Campagne des Pyrénées.

Mais les Palois en furent quittes pour la peur. Peur du reste démunis de fondement, puisque Wellington sut imposer à son armée une discipline exemplaire.

Après la bataille d'Orthcz, Soult, en effet, battit en retraite par le nord du département. Le Préfet et le Général Couttard avec les troupes placées sous les ordres de ce dernier, avaient quitté Pau dans la nuit du 3 au 4 mars, se repliant sur Tarbes, tandis que le chef d'escadron Maluquer, commandant de la place de Pau, entraînant une partie de ses subordonnés avec lui, se ralliait â Wellington.

Dans la matinée du 6 mars, un détachement de cavalerie pénétrait â Pau, uniquement pour vérifier s'il y avait une force armée militaire. Le 7 y arrivaient la brigade de cavalerie et une brigade d'infanterie de la division Steward. Mais dès le 10, ces troupes s'étaient remises en marche, ne laissant dans la ville que deux officiers et vingt deux soldats portugais qui furent faits prisonniers le même jour par une poignée de hussards français.

Au reste, poursuit M. Rite, si les golfeurs palois tiennent à se prévaloir d'un arbre généalogique plongeant ses racines dans la nuit des temps, ne leur suffit-il pas d'affirmer que Pau fut une capitale des sports avant la lettre ?

Et il enchaîne avec une pointe d'humour :mais après tout, n'est-ce pas assez pour l gloire du golf de Pau qu'il soit incontestablement le plus ancien du Continent ? 

On sait comment, à partir de la Restauration, les Britanniques, séduits par la beauté du site et par la douceur du climat, vinrent sans cesse plus nombreux passer l'hiver â Pau.

L'année 1856 qui allait apporter à Bosquet son bâton de Maréchal devait doter Pau de son terrain de golf.

La France et la Grande-Bretagne fraternisaient. La capitale du Béarn étant devenue une sorte de colonie britannique, il se trouvait parmi elle quelques écossais nostalgiques de leur sport favori.

Lord Hamilton (Duc d'Hamilton et de Brandon) les colonels Hutchinson et Anstruther, le major Pontifex et l'archidiacre Sapte coopérèrent â cette première réalisation, ayant choisi des terrains sur la commune de Billère le long du gave à peu de distance du centre de l'agglomération paloise.

La création donc de ce club semble échapper totalement au contrôle des Palois et des Béarnais.

Cependant quelques remarques intéressantes sont nécessaires. Si, comme nous l'avons vu, les soldats de Wellington ne sont pas à l'origine du golf, par contre il semblerait certain que sous "Nouste Henric" l'allée qui parcourt lé parc depuis le château jusqu'à l'entrée du Club House actuel de Billère, servait à jouer au mail. Il y a bien sûr une différence entre ce jeu et le golf. Le mail se pratiquait à l'aide d'une lourde boule de buis frappée par un maillet analogue à celui du croquet. I1 est néanmoins amusant de savoir que 250 ans auparavant un jeu semblable se pratiquait déjà sur les mêmes lieux.

Il est à noter que Lord Hamilton était un arrière-petit-neveu d'Antoine Hamilton, écrivain écossais, marié à Elisabeth d'Hamilton, Princesse Marie of Baden, Comtesse de Grammont, descendante de Corisande d'Andoins...

En 1856 donc, un petit abri en bois fut édifié en bordure des links. Ceux-ci ne comportaient que neuf trous. Le premier golf du Continent était né.

En 1850 il existe déjà 17 clubs en Grande-Bretagne.

Deux autres aussi à noter aux Indes, en 1829 Calcutta, et en 1842 Bombay. I1 existe des golfs antérieurs en Amérique du Nord à Charleston et en Australie.

En 1856, le Duc d'Hamilton et de Brandon fut installé au château de Pau en raison de la parenté de sa femme. La Duchesse quant à elle, arriva en janvier 1857 à Bayonne par la ligne de chemin de fer inaugurée l'année précédente, la ligne Dax-Pau n'existant pas encore.

De nombreuses fêtes marquèrent le séjour des hôtes de la ville, entre autres, l'inauguration officielle des installations de la plaine de Billère. Malheureusement, un temps épouvantable empêcha cette manifestation.

En 1858, la commune de Billère voulut vendre le terrain loué aux étrangers. Mais cela se révéla impossible car la législation française ne le permettait pas. Finalement un bail emphytéotique fut concédé au golf par la commune de Billère grâce à l'intervention de la municipalité de Pau. Ce bail fut modifié plusieurs fois selon les municipalités en place.

 ( d 'apès le livre du

 Dr Yves CAILLE

5 place de la Mairie

64140 Billère)