Le rôle de l'échange international dans le développement économique à partir de l'analyse de Ricardo
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Dossier 1 - Les échanges internationaux
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Précaution méthodologique :

Il s'agit de travailler un extrait long d'un livre . La structure de l'argumentation du début du XIXième est très différente de celle requise actuellement. Le thème portant sur un pan entier de l'économie (et ici un texte fondateur) requiert ce type d'analyse de texte.

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Paragraphe 1
C'est pourquoi le commerce étranger est très avantageux pour un pays puisqu'il augmente le nombre et la variété des objets auxquels on peut employer son revenu et qu'en répandant avec abondance les denrées à bon marché, il encourage les économies et favorise l'accumulation des capitaux, ce commerce, dis-je, ne tend nullement à accroître les profits du capital, à moins que les articles importés ne soient de la nature que ceux que l'ouvrier consomme.
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Paragraphe 2
Dans un système d'entière liberté de commerce, chaque pays consacre son capital et son industrie à tel emploi qui lui paraît le plus utile. Les vues de l'intérêt individuel s'accordent parfaitement avec le bien universel de toute la société. C'est ainsi qu'en encourageant l'industrie, en récompensant le talent, et en tirant tout le parti possible des bienfaits de la nature, on parvient à ne meilleure distribution et plus d'économie dans le travail. En même temps, l'accroissement de la masse générale des produits répand partout le bien-être ; l'échange lie entre elles toutes les nations par les nœuds communs de l'intérêt et des relations amicales, et en fait une seule et grande société. C'est ce principe qui veut qu'on fasse du vin en France et en Portugal, et qu'on fasse de la quincaillerie et d'autres articles en Angleterre. (…)
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Paragraphe 3
Si les profits des capitaux employés dans le Yorkshire surpassaient ceux des capitaux employés à Londres, les fonds passeraient bien vite de Londres dans le Yorkshire et les profits se nivelleraient. Mais, si le sol de l'Angleterre devenait moins productif, ou si l'accroissement des capitaux et de la population venait à faire monter les salaires et à faire baisser les profits, il ne s'en suivrait pas pour autant que le capital et la population dussent nécessairement abandonner l'Angleterre et se porter en Hollande, en Espagne ou en Russie où les profits pourraient être plus élevés. Si le Portugal n'avait aucune relation commerciale avec d'autres pays, au lieu d'employer son capital et son industrie à faire du vin avec lequel il achète aux autres nations le drap et la quincaillerie nécessaires pour son propre usage, ce pays se trouverait forcé de consacré une partie de ca capital à la fabrication de ces articles qu'il n'obtiendrait plus probablement qu'en qualité inférieure en quantité inférieure.
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Paragraphe 4
La masse de vin que le Portugal doit donner en échange pour le drap anglais n'est pas déterminée par la quantité respective de travail que la production de chacun de ces deux articles a coûtée ; ce qui arriverait s'ils étaient tous deux fabriqués en Angleterre ou au Portugal.
L'Angleterre peut se trouver dans des circonstances telles qu'il lui faille, pour fabriquer le drap, le travail de cent hommes par an, tandis que, si elle voulait faire du vin, il lui faudrait peut-être le travail de cent vingt hommes par an : il serait donc de l'intérêt de l'Angleterre d'importer du vin, et d'exporter en échange du drap.
En Portugal, la fabrication du vin pourrait ne demander que le travail de quatre-vingts hommes pendant une année, tandis que la fabrication du drap exigerait le travail de quatre-vingt-dix hommes. Le Portugal gagnerait donc à exporter du vin en échange pour du drap. Cet échange pourrait même avoir lieu dans le cas où on fabriquerait en Portugal l'article importé à moins de frais qu'en Angleterre. Quoique le Portugal pût faire son drap en n'employant que quatre-vingt-dix hommes, il préférerait le tirer d'un autre pays où il faudrait cent ouvriers pour le fabriquer, parce qu'il trouverait plus de profit à employer son capital à la production du vin, en échange duquel il obtiendrait de l'Angleterre une quantité de drap plus forte que celle qu'il pourrait produire en détournant une portion de son capital employée à la culture des vignes, et en l'employant à la fabrication des draps.
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Paragraphe 5
Dans ce cas, l'Angleterre donnerait le produit du travail de cent hommes en échange du produit du travail de quatre-vingts. Un pareil échange ne saurait avoir lieu entre les individus du même pays. On ne peut échanger le travail de cent Anglais pour celui de quatre-vingts autres Anglais mais le produit du travail de cent Anglais peut être échangé contre le produit du travail de quatre-vingts Portugais, de soixante Russes ou de cent vingt Asiatiques. Il est aisé d'expliquer la cause de la différence qui existe à cet égard entre un pays et plusieurs : cela tient à l'activité avec laquelle un capital passe constamment, dans le même pays, d'une province à l'autre pour trouver un emploi plus profitable, et aux obstacles qui en pareil cas s'opposent au déplacement des capitaux d'un pays à l'autre.
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Paragraphe 6
Dans la supposition que nous venons de faire, les capitalistes de l'Angleterre et les consommateurs des deux pays gagneraient sans doute à ce que le vin et le drap fussent l'un et l'autre faits en Portugal, le capital et l'industrie anglaise passant, par conséquent, à cet effet de l'Angleterre en Portugal.
Dans le cas supposé, la valeur relative de ces deux objets se règlerait d'après le même principe que si l'une était une production de l'Yorkshire et l'autre de Londres ; et dans tout autre cas, si les capitaux affluent librement vers les pays où ils trouvent un emploi plus profitable, il ne pourra exister dans les taux de profits, et dans le prix réel des choses, de différences autre que celle qui proviendrait du surcroît de travail nécessaire pour les porter aux différents marchés.
Nous savons, cependant, par expérience, que bien des causes s'opposent à la sortie des capitaux. Telles sont ; la crainte bien ou mal fondée de voir s'anéantir au-dehors un capital dont le propriétaire n'est pas le maître absolu, et la répugnance naturelle qu'éprouve tout homme à quitter sa patrie et ses amis pour aller son confier à un gouvernement étranger et assujettir des habitudes anciennes à des mœurs et à des lois nouvelles. Ces sentiments, que je serais fâché de voir affaiblis, décident la plupart des capitalistes à se contenter d'un taux de profit moins élevé dans leur propre pays plutôt que d'aller dans des pays étrangers un emploi plus lucratif pour leurs fonds.
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Paragraphe 7
Supposons maintenant que l'on découvre en Angleterre, pour faire du vin, un procédé tellement avantageux qu'il fût plus profitable à ce pays de le faire avec son propre raison plutôt que de l'importer ; dans ce cas, une partie du capital de l'Angleterre serait détournée du commerce étranger pour être appliqué au commerce intérieur. L'Angleterre cesserait de produire du drap pour l'exportation et ferait du vin pour sa consommation. Le prix en argent de ces articles serait réglé en conséquence. Le vin baisserait en Angleterre pendant que le drap se maintiendrait à l'ancien prix ; tandis qu'en Portugal, il n'y aurait aucun changement de prix de l'un ni de l'autre. On continuerait pendant quelque teps à exporter du drap de l'Angleterre en Portugal, où son prix se maintiendrait toujours plus élevé qu'en Angleterre ; le Portugal ne paieraient plus alors en vin mais en argent jusqu'à ce que l'abondance de l'argent en Angleterre et sa rareté à l'étranger eussent influé tellement sur la valeur du drap dans les deux pays que son exportation en Angleterre cessât d'être profitable. Si le nouveau procédé pour faire du vin offrait de très grands avantages, il pourrait convenir aux deux pays de changer d'industrie : à l'Angleterre de faire du vin et au Portugal de fabriquer tout le drap pour la consommation des deux pays. Mais cela ne pourrait avoir lieu sans que, par l'effet d'une nouvelle distribution des métaux précieux, le prix du drap haussât en Angleterre, tandis qu'il baisserait en Portugal . Le prix relatif du vin baisserait en Angleterre, par suite des avantages réels du nouveau procédé pour faire le vin ; c'est-à-dire que son prix naturel baisserait et que le prix relatif du drap hausserait dans ce pays par l'effet de l'abondance de l'argent.
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Source : D. Ricardo, Des Principes de l'économie politique et de l'impôt, 1821, Flammarion 1992