Hier
matin a eu lieu à la médiathèque d'Este de Billère une rencontre
avec Georgi Lazarevski, réalisateur du documentaire Voyage
en sol majeur.
Ce moyen métrage est un film-album retraçant le voyage rêvé
d'un vieil homme. Le temps d'une projection, nous partageons
le rêve de ce grand-père : fouler cette terre étrangère,
le Maroc. Cet homme introverti, à l'enfance difficile, voit
ensuite sa vie professionnelle compromise.
En effet, ce virtuose de la musique devient peu à peu sourd,
chose qui le perturbera tout au long de sa vie. Exprimant
ses sentiments au cours du film, il apparaît plus réceptif
au fur et à mesure du voyage.Il part à la découvert de ce
pays avec son regard d'enfant plein d'innocence et d'humour.
Ce film aborde de nombreux thèmes dont l'amour, le souvenir,
la mort et le rapport humain. S'ouvrant à de nouveaux horizons,
il se plonge surtout dans la découverte de lui-même et de
son entourage. " Faire du cinéma, c'est toujours dire à
quelqu'un : je t'aime ". Voilà une facette clé du cinéma
de ce jeune réalisateur qu'il a dévoilé au cours d'une rencontre
passionnée avec les spectateurs.
Durant cet échange, il a insisté sur le fait que ce voyage
a d'abord amélioré les relations avec son grand-père qu'il
perçoit enfin aujourd'hui comme un homme libéré prêt à oser
sa vie.Le film devient alors un outil, un prétexte pour
aller plus loin dans cette relation, et il a permis à travers
le regard de la caméra de saisir l'enfant qui renaissait.
Ce voyage devenait alors une libération, une soif de vivre.
Rien
n'était gagné d'avance, il fallait simplement oser. Oser
sortir c'et homme de sa routine, de son tourment et lui
proposer un ailleurs qui puisse combler son rêve. Ce qu'il
y a de très émouvant aussi c'est le apport du personnage
avec la mort qui lui paraissait jusque-là insignifiante.
Au fil de aventure, il comprend qu'il aimerait le plus longtemps
possible garder autour de lui les êtres qui lui sont chers.
Et chacune des images fixe à jamais le souvenir.
Avant la projection, nous avons eu le temps de découvrir
l'exposition photos qui retrace le chemin parcouru au Maroc.
Trois thématiques nous ont sauté à l'œil: les rencontres
avec l'autre, la symbolique des paysages, et les rapports
entre l'écriture et les souvenirs. Les couleurs propres
à la culture marocaine, les sourires radieux de l'homme
initié, sa joie dl'être là jaillissent de la plupart de
ces clichés qui disent tous l'authenticité du moment vécu
sans jamais tomber dans l'exotisme. D'ailleurs le réalisateur
avoue dissocier son. œuvre photographique et son travail
filmique car il le s'agit en aucun cas d'apporter des rajouts,
nais au contraire de viser à une pureté certaine, un dépouillement,
seul moyen possible pour définir le paradis.
Plaisir d'échanger: Georgi Lazarevski a eu la gentillesse
de répondre à quelques-unes de nos questions.
Une photo nous a particulièrement touchés: il s'agit
du gros plan de la main du grand-père en train de remplir
son carnet de voyage. Que signifie t-elle pour vous ?
GL : C'est le moment où il écrit à sa femme Alice et où
il la rassure en lui disant que tout va bien. J'étais par
dessus son épaule et je regardais les mots qu'il écrivait.
C'était assez émouvant de le voir parler du Maroc: son éblouissement
devant les palmiers, et de le retrouver, aussi en même temps
avec son caractère bien trempé. Il les décrit verts et bien
ordonnés. C'est à ce moment-là qu'il a écrit que s'il croyait
au paradis se serait une palmeraie: Il avait le sentiment
d'avoir approché le paradis.
Finalement votre grand-père apparaît comme un enfant
innocent et qui découvre une terre étrangère.
GL: Il a une part de naïveté et d'innocence et d'humour,
mais aussi de gravité. Il est absolument adulte, il porte
en lui tous ses regrets, ses souffrances. Il a réussi à
conserver en lui cette part de naïveté, d'enfant apte à
s'émerveiller des choses de la vie.
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